dimanche 24 novembre 2013

EMDR : à partir d'une intuition *

En 1979, pendant qu'elle est à terminer un doctorat en littérature anglaise à l'Université de New York, Francine Shapiro apprend qu'elle est atteinte de cancer. Parallèlement à ses traitements médicaux, elle se met à explorer les liens entre le stress, l’activité mentale et la maladie, liens mis à jour par les nouvelles découvertes de la psychoneuroimmunologie. En plus de participer à toutes sortes de séminaires et d'ateliers sur le corps-esprit (mind-body) donnés à travers les États-Unis, elle reprend ses études, en psychologie cette fois, et obtient un doctorat.
Mais c'est une intuition, survenue pendant qu'elle se promène dans un parc en ruminant quelques idées noires, qui la met sur la piste de l'EMDR. Tout à coup consciente du fait qu'elle projette nerveusement son regard de gauche à droite, elle se rend compte que la charge négative de ses pensées vient de diminuer. Elle ose donc l'hypothèse d'un lien entre les deux événements. S'ensuivent quelques mois d'expérimentation sur elle-même, puis avec ses proches, et enfin avec ses clients en psychothérapie. Sa première recherche clinique commence fin 1987.
*ref : Passeport Santé

dimanche 10 novembre 2013

EMDR, la thérapie qui libère

L'EMDR est en train de révolutionner la psychothérapie. Cette thérapie de désensibilisation et de retraitement par le mouvement rapide des yeux permet de traiter de très nombreux traumatismes psychiques.

EMDR est l’acronyme de "Eye Movement desensitization and reprocessing". En français: désensibilisation et retraitement par le mouvement des yeux. Cette méthode thérapeutique a depuis quelques années révolutionné la conception et la pratique de la psychothérapie grâce à sa  rapidité et son efficacité. L’EMDR a tout d’abord été utilisée pour effacer des chocs post traumatiques.

Mais aujourd’hui, on l’utilise pour traiter toutes sortes de traumatismes psychiques, comme les abus sexuels, les phobies, les dépressions. Si la technique a été découverte fortuitement aux Etats-Unis (en 1987), elle a dans un premier temps généré méfiance et scepticisme, certains pensant qu’il s’agissait d’un effet placebo.

Des études scientifiques ont mis en évidence les effets de l’EMDR sur le cerveau. Le neurophyiologiste Marco Pagani. Ce dernier a conduit une étude sur 47 conducteurs de métro victimes d’un choc post traumatique après avoir vu des gens se jeter sous leur rame. Avant la thérapie, il a observé que leur cerveau semblait incapable de gérer les émotions provoquées par le souvenir traumatisant. Après l’EMDR, il a constaté que la zone cognitive du cerveau avait pris le contrôle sur la zone émotionnelle.

Un reportage de  Françoise Ducret et Ventura Samarra

EMDR, la thérapie qui chasse les démons - rts.ch - émissions - 36.9°


https://institutpsy.com/

samedi 9 novembre 2013

EMDR : Une thérapie pour guérir des traumatismes

Rendue populaire en France par le Docteur David Servan-Schreiber en 2003, l’EMDR est un nouveau traitement utilisé par les psychologues pour guérir les patients d’un stress post-traumatique. Cette technique encore controversée a fait coulé beaucoup d’encre, mais malgré les critiques, de plus en plus patients y font appel pour guérir de souvenirs traumatisants. Présentation de cette thérapie brève avec Martine Gercault, psychologue clinicienne, membre de l’association EMDR-France.

Définition

L'EMDR ou Eye Movement Desensitization and Reprocessing est une approche psychothérapeutique neuro-émotionnelle de désensibilisation et de retraitement des informations faisant appel à la stimulation sensorielle par des mouvements oculaires, des stimuli auditifs ou cutanés, pour faciliter une résolution rapide des symptômes liés à des événements traumatiques du passé. Cette thérapie trouve ses racines dans la psychanalyse, la thérapie cognitive comportementale, la médecine humaniste, les thérapies systémiques et les thérapies brèves centrées sur la personne.

L’EMDR, créée à la fin des années 80 à San Francisco par la psychologue américaine Francine SHAPIRO, est devenue en moins de dix ans l’un des modes de traitement psychothérapeutique les plus efficaces du PTSD(Post Traumatic Disorder), ou en français ESPT (État de Stress Post-Traumatique).
Le protocole EMDR repose sur une approche humaniste et intégrative de la médecine et de la santé : la confiance dans notre potentiel d’auto-guérison, l’importance de notre histoire personnelle et du lien psychosomatique dans la genèse des troubles.

Une thérapie pour guérir des traumatismes


De nombreuses études cliniques semblent démontrer l'efficacité de l'EMDR dans la résolution des états de stress post-traumatique, tant chez des témoins ou victimes de traumatismes civils (viols, accidents, deuils, agressions, accidents automobiles etc…) que chez celles de pays en état de guerre ou des survivants des camps de concentration. Les victimes savent que le danger est écarté mais elles ne le « ressentent pas ». Les émotions sont refoulées et pourtant la détresse est, elle, toujours présente.

L’état de stress post-traumatique provoque une souffrance intense et peut transformer la vie du sujet concerné ou de sa famille en un quotidien insupportable s’accompagnant de dépression, troubles somatiques, phobies ou toxicomanie. L’EMDR désamorce, débloque et libère les expériences traumatiques anciennes de leur charge émotionnelle et de leurs distorsions cognitives par un retraitement des informations.

L’image narcissique du patient est restaurée et l’élan vital retrouvé. Cette approche permet une révision de l’interprétation de la réalité passée et une réponse mieux adaptée au présent tout en favorisant une restructuration psychologique et affective ainsi qu’un meilleur fonctionnement personnel et social.

Outre les états post traumatiques, le champ d’application de l’EMDR s’étend aujourd’hui au traitement d’adultes et d’adolescents présentant des troubles anxieux, dépressifs, somatiques et psychosomatiques, à des patients handicapés, à des malades subissant des traitements médicamenteux lourds, au deuil etc.

Comment se déroule une séance EMDR ?


L’EMDR permet donc au cerveau le retraitement de l’information émotionnelle afin de supprimer le traumatisme passé enkysté dans le système nerveux.

Avant de débuter le traitement EMDR, il est essentiel que le psychothérapeute et le patient établissent ensemble le cadre de leur futur travail par des entretiens préliminaires et une anamnèse rigoureuse permettant de cerner des contre-indications éventuelles.

C’est cette sécurité de l’espace thérapeutique qui offrira au patient la possibilité de se confronter à l’origine de sa souffrance. Les bases du « travail » établies, le praticien aidera le patient à repérer et se représenter le plus exactement possible l’origine du problème ou l’événement cible, à ressentir dans son corps les perceptions, émotions et sensations qui lui sont liées.

Pendant que les pensées et les affects (sentiments) remontent à la surface, le psychothérapeute opère des balayages de sa main devant le visage du patient qui les suit rythmiquement des yeux. Ces séries successives et assez brèves de mouvements oculaires (30 secondes à quelques minutes) se poursuivent jusqu'à ce que les émotions se neutralisent et que les cicatrices émotionnelles du passé soient vidées de leur charge traumatique.
Régulièrement, le praticien invite le patient à évaluer son stress sur des échelles de valeur et l’aide à se détendre par des métaphores relaxantes. Grâce au processus neurologique mis en marche, le cerveau est stimulé et métabolise ainsi les résidus disfonctionnels du passé. Les souvenirs traumatisants perdent leur charge affective négative, ce qui met fin à la souffrance et aux réactions négative (crises de panique, peurs incontrôlées, anxiété, compensations de toutes sortes, etc.).

Par ce procédé, les images, les perceptions et les souvenirs qui étaient encodés négativement dans le cerveau émotionnel sont littéralement « digérés » et perdent de leur intensité dramatique. L’adversité passée fait place à ce que Boris CYRULNIK nomme la « résilience ». Une nouvelle personne peut émerger.
L'EMDR s'inscrit à l'intérieur d'un traitement psychothérapeutique dont toutes les dimensions doivent être bien codifiées et structurées. Le processus complet comprend plusieurs étapes, dont une phase de préparation et chaque session requiert une intégration verbale indispensable.

Entre les séances, le re-traitement de l’information émotionnelle liée à l’incident ou au matériel évoqué peut se prolonger sous formes de rêves occasionnant la réémergence d’autres souvenirs ou émotions inhabituelles. Le travail se poursuit donc dans l’ « après-coup », c’est la raison pour laquelle le suivi thérapeutique et la dimension analytique sont indispensables à la « métabolisation » (ou digestion) de l’expérience.

Pour clôturer ce bref aperçu, l’EMDR n’est pas une approche adaptée aux dépressions endogènes, d’origine biologique ni aux états dissociatifs : psychoses, schizophrénie et autres démences.

Le livre de référence des praticiens EMDR et de l'enseignement de la méthode s'intitule "Eye-movement Desensitization and Reprocessing : Basic principles, protocols and procedures", publié par Guilford Press (2001). Son auteur est Francine SHAPIRO, Ph.D, fondatrice de la méthode EMDR, Senior Research Fellow du Menlo Park Research Institute ("École de Palo Alto"), et présidente de l'EMDR Institute, Californie. En juillet 2002, Francine SHAPIRO a reçu le prix Sigmund FREUD décerné conjointement par le Congrès Mondial de Psychothérapie et la ville de Vienne.


EMDR - reportage Télé-Québec - Pilule - Granule 10 octobre 2013

Télé-Québec : Vidéo


Mise au point en 1987 par une psychologue américaine, Francine Shapiro, la technique EMDR (pour Eye Movement Desensitization & Reprocessing) est de plus en plus utilisée pour soigner différents problèmes, et tout spécialement les cas de stress post-traumatiques. Et même si aux yeux de plusieurs cette technique peut sembler saugrenue, des experts nous confirment que ça fonctionne. Le hic, c’est que pour l’instant, on ne comprend pas encore pourquoi…
Experts invités :
Alain Brunet, PhD
Professeur en psychiatrie
Institut universitaire en santé mentale Douglas
Dr Denis Houde
Psychologue
Services psychologiques Cogicor
La technique EMDR : de quoi s’agit-il?
«Il existe plusieurs approches thérapeutiques pour traiter un trauma, explique le Dr Alain Brunet, professeur en psychiatrie à l’Institut Douglas. La technique EMDR est une façon de métaboliser le souvenir traumatique.»
«C’est une stimulation bilatérale alternée, ajoute le psychologue Denis Houde. Que la personne soit occupée à faire autre chose en même temps qu’elle se concentre sur le traumatisme permettrait à ce moment-là de réduire la vivacité du souvenir qui va perdre de sa charge émotive. Le but de la technique, c’est de traiter un souvenir traumatique, une expérience, pour qu’elle soit intégrée, assimilée et qu’elle ne cause plus de problèmes à la personne.»
Concrètement, le thérapeute stimule bilatéralement la personne pendant qu’elle plonge dans le souvenir de son traumatisme. Il peut par exemple déplacer rapidement un objet devant elle. La personne doit alors le suivre des yeux tout en gardant la tête fixe. Le mouvement rythmique des deux yeux serait équivalent à celui qui a lieu spontanément pendant les rêves.
Est-ce efficace?
«Oui, ça fonctionne, soutient le Dr Alain Brunet. Il y a plusieurs études scientifiques qui ont établi l’efficacité de l’approche EMDR. Mais, par contre, comment est-ce que ça fonctionne, ça, ça reste encore beaucoup plus nébuleux.»
Le Dr Brunet précise que l’une des hypothèses est que la stimulation bilatérale des yeux expliquerait l’efficacité de cette technique, mais ce n’est vraiment pas prouvé, souligne-t-il.
«Le mouvement des yeux, ce n’est pas établi qu’il est absolument essentiel, souligne-t-il. Il y a des études qui suggèrent que oui, et d’autres suggèrent que non.» Il est donc impossible, à ce stade de la recherche, de parvenir à une conclusion définitive.
En dépit de ces zones grises, il n’en demeure par moins que la technique EMDR présente certains avantages indéniables : «Il faut vraiment partir d’où est le patient et entrer dans son monde, et la technique EMDR permet ça, et c’est ce qui constitue, je pense, une de ses grandes forces.»
Il s’agit également d’une approche qui fonctionne rapidement à court terme. Selon Denis Houde, il est possible d’obtenir de bons résultats à l’intérieur de trois à cinq séances. Les gens se sentent libérés de la charge émotive de leur souvenir traumatique. Par exemple, une personne qui a cru qu’elle allait mourir va plutôt commencer à réaliser qu’elle a survécu et que tout ça est maintenant derrière elle.
«Je ne crois pas qu’il faut s’alarmer du fait qu’on ne comprend pas bien comment la technique EMDR fonctionne, conclut le Dr Brunet. Là, où je ferais certains reproches à la communauté EMDR, par contre, c’est de ne pas s’être suffisamment intéressée à la question de savoir comment ça fonctionne, et de ne pas avoir poussé l’investigation scientifique de manière très rigoureuse. Cela dit, il est fermement établi que cette approche fonctionne aussi bien que d’autres approches plus anciennes et mieux établies.»

vendredi 8 novembre 2013

Santé : EMDR

Article du Journal Le Devoir, novembre 2003

Femmes battues, victimes de guerre : même combat ? Oui madame ! Le stress post-traumatique n'est plus réservé aux soldats, il s'étend désormais aux traumatismes de l'enfance aussi bien qu'aux accidents et aux chocs récents. Quand on est très affecté, on peut péter les plombs sans pour autant faire une psychose. On voit un animal à la fenêtre, on lui parle quand on veut se réconforter : on n'est pas fou, on fait de la dépersonnalisation.


On peut être agressé comme si on était en dehors de soi et ne rien ressentir (par exemple, une prostituée agressée sexuellement à répétition pendant son enfance) : on parle ici de dissociation. Le médecin recommandera des antidépresseurs s'il ne connaît pas les symptômes du choc post-traumatique, passant ainsi à côté de la guérison. C'est triste.

Quand Serge Saintonge m'explique ça avec toutes sortes d'images, on est en train de parler d'EMDR, ce qui me fait penser au professeur Tournesol, vous savez : les yeux à gauche, à droite, suivez mon doigt. EMDR, c'est pour eye movement desensitization and reprocessing, une technique encore nouvelle qui se fait connaître par l'entremise de David Servan-Shreiber, qui vient donner des séances de formation de temps en temps. M. Saintonge est l'un des premiers à s'être intéressé au EMDR ; il me raconte qu'il passait pour un hurluberlu quand il en parlait à ses collègues. Ça change.

Clarifions tout de suite la question Tournesol : Serge Saintonge n'aime pas mon image. Psychologue et hypnothérapeute en plus d'être parmi les quelques spécialistes du choc post-traumatique, il me dit : « Il y a dans cette image que c'est nous qui avons du pouvoir ; mais non, c'est vous qui décidez d'entrer en hypnose, c'est de l'autohypnose qui fait réactiver un processus de guérison naturel qui est en vous. » Et nous voici en plein coeur de la philosophie de l'EMDR. Notre corps a la capacité de s'autoguérir. Il faut savoir l'aider.

Cette idée me plaît tellement ! Je voudrais tant que la médecine s'oriente vers ma capacité d'autoguérison, cherche dans cette direction qui la conduirait à la promotion de la santé. Prévenir par un mode de vie, penser l'hygiène comme une récompense d'amour-propre, éduquer aux premiers soins. Je sais que c'est une tendance : en parlant avec les gens de la Croix-Rouge, j'apprends que la Commission scolaire de Montréal propose dorénavant le programme « Secouriste averti » dans toutes ses écoles : encourageons les jeunes à se déniaiser devant un accident !

Pour revenir à l'EMDR, si vous pensez que c'est une technique rapide qui donne accès au cerveau émotionnel, efface les lésions et au revoir, oubliez ça. Le psychologue commence comme tous les psychologues : il évalue votre cas. « On ne travaillera pas l'événement traumatique d'abord. On s'assurera auparavant que vous êtes capable de trouver en vous un endroit de paix : ce sera le pont. On ne fait pas passer le matériel lourd si le pont n'est pas solide », m'explique Serge Saintonge. On remontera à votre premier souvenir, on parlera de l'image de soi, puis de l'image que l'on aimerait avoir de soi. Il y a aussi tout un protocole à suivre : donner une cote sur sept ou sur dix pour tel ou tel élément, par exemple. De son côté, le psy évalue ; c'est l'aspect technique. Mais finalement, on passe aux mouvements des yeux. « Imaginez un carrousel de diapositives, me dit le psy. Vous avez un carrousel inceste dans le cerveau et vous ne connaissez pas toutes les images. L'EMDR active l'appareil, qui se met à fonctionner avec des images qui ont un début et une fin... Ensuite, on vérifie à quel point l'image perturbe encore, on reparle de l'image positive et on refait le mouvement des yeux pour ancrer plus solidement l'image positive de soi. » Les séances terminées, vous êtes guéri. Ou, si vous voulez, dans le jargon des psys, vous avez intégré le traumatisme dans l'ensemble de votre personnalité, vous êtes en paix avec votre passé.

S'il y avait un prix Nobel de la psychologie, il faudrait le donner à Francine Shapiro, qui a inventé cette technique et réussi à la faire accepter par ses pairs. « La technique EMDR permet la connexion entre le cerveau émotionnel et le cortex. La compréhension plus récente du cerveau émotionnel nous fait saisir que c'est lui qui encaisse d'abord l'événement traumatisant », résume Serge Saintonge. L'intervenant doit connaître le syndrome du choc post-traumatique en plus de recevoir la formation EMDR. Il y aurait une cinquantaine de praticiens à Montréal et une trentaine ailleurs au Québec. Judith Black, la nouvelle présidente de l'Association canadienne de l'EMDR (emdrac.ca), recommande de choisir quelqu'un d'un ordre professionnel reconnu ayant au moins le niveau 1 de formation (il y en a deux). Un praticien certifié a... un certificat, n'est-ce pas ? Ça se demande.

Il y a des gens qui font dix ans de thérapie, qui peuvent vous expliquer le quoi du comment des noeuds... qui les angoissent et les manipulent encore. Ceux-là sont de bons candidats pour l'EMDR. On peut utiliser cette technique pour diverses pathologies : troubles d'anxiété, dépression, faible estime de soi, troubles alimentaires, douleurs chroniques, membre fantôme... Vous vous rendez compte ? Imaginez un psy formé à cette technique en résidence dans chaque maison de femmes battues... Des travailleurs de rue pourraient ramasser des gens en crise... Bon, je m'emballe. Avouez qu'il y a de quoi.